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Transphotographiques / Lille / Hauts-de-France
 

Fotografie Magazin (Rép. Tchèque) : Transphotographiques

Fotografie Magazin (Rép. Tchèque) : Transphotographiques

Par Vladimir Birgus

Tandis que l’an dernier, le festival Transphotographiques dans le Nord de la France à Lille s’est déroulé sous le titre Photographie et Cinéma, cette année, le festival a eu lieu de la mi-mai jusqu’à la mi-juin et s’est axé sur la mode. Encore une fois le sujet étant défini d’une manière assez large, on a pu trouver côte à côte des expositions de photographies de mode, l’exposition One Man Show du célèbre créateur de mode Karl Lagerfeld, l’exposition des clichées ayant pour sujet la dentelle et de nombreuses séries de photographies numériquement manipulées.

Le festival dans l’ancien Tri Postal a été visité par plus de cent milles visiteurs

Les organisateurs des Transphotographiques sous la direction du président du festival Bernard de Talhouet et du directeur Olivier Spillebout ne cachent pas que par le choix de sujets attrayants, ils veulent attirer le plus grand nombre de visiteurs. Et ils y arrivent.

L’an dernier, seulement la principale exposition dans les locaux énormes de l’ancien Tri Postal au centre de la ville a été visité par cent milles personnes. Cette année, on attendait un nombre de visiteurs équivalent. Le festival a une excellente promotion, dans toute la ville de Lille, et aussi dans ses alentours, on a vu des centaines de ses affiches et bilboards, le plus grand magazine Photo lui a consacré presque tout son numéro du mois de mai, la télévision, la radio et la presse en parlaient régulièrement. Des lecture de portfolios, de différentes conférences et projections faisaient partie du festival. En plus, presque toutes les expositions du festival ont eu lieux dans des locaux de qualité, y compris le magnifique Palais des Beaux Arts ainsi que de nombreux beaux musées et galeries et sauf quelques petites exceptions, elles étaient accessibles gratuitement. C’est une différence considérable avec par exemple Le mois de la Photographie à Cracovie où cette année la plupart des expositions ont eu lieu dans différents clubs, pubs et appartements vides ou encore avec le mois de la Photographie à Bratislava où même les commissaires, les journalistes et les auteurs exposées ont été obligés de payer l’entrée. L’attraction principale de cette année devait être une exposition gigantesque de 300 photographies de Karl Lagerfeld nommé One Man Show. Lagerfeld a déjà montré plusieurs fois qu’il est non seulement un des plus grands créateurs d’aujourd’hui mais aussi un bon photographe. D’ailleurs, l’an dernier il a été lauréat du prestigieux prix annuel du Centre Internationale de la Photographie à New York. Cette fois-ci, il a présenté une vaste série de portraits, de photos de nu et des mises en scènes qui ont été réalisé pendant sept ans avec son modèle, un ami proche, Brad Kroening. Dans les photographies où Kroening joue James Dean, les héros cowboys du film Le Secret de Brokeback Mountain, un gentleman boutonné aux cheveux blonds d’un âge moyen ou un jeune homme sexuellement provocant, il a capté ses changements et mimétismes parfaits et dans de nombreux cas il a révélé quelques choses sur lui et ses préférences mais finalement il n’a pas été si intéressant. L’exposition avec les projections d’accompagnement a été inutilement vaste, de nombreux clichés se répétaient dans des variantes différentes, certains littéralement ennuyaient. Le proverbe «parfois moins est plus» a pris ici tout son sens. Le choix plus rigoureux du commissaire Gerhard Steidl, le propriétaire de la maison d’édition du même nom qui a édité le catalogue de Lagerfeld, aurait pu être bien utile à cette exposition. En tous cas, Lagerfeld et sa présence personnelle, bien suivie par les média, a largement aidé à la promotion du festival.

L’exposition des clichés de Jeanloup Sieff a été brillamment choisie

Par contre, l’exposition des clichés uniquement en noir et blanc du photographe de mode français mondialement connu Jeanloup Sieff a été choisie brillamment. Sur les prises de vu mises en scènes, réalisées dans la plupart des cas dans des extérieurs, en utilisant de manière inventive les possibilités des objectifs grand angle, l’exposition montrait que Sieff est compté, à juste titre, de même que William Klein, Frank Horvat, Helmut Newton et Guy Bourdon, parmi les innovateurs les plus importants de la photographie de mode européenne des années 60, qui a adéquatement réagi aux changements bouleversants de la création de mode de l’époque. Sieff préférait photographier en extérieurs plutôt qu’en studio, il se laissait inspirer par des photos de reportage et par les films de l’époque, dans son cas, surtout par les œuvres de metteurs en scène de la nouvelle vague du cinéma français. Pour ses prise de vu de mode, il coopérait assez souvent avec les meilleurs acteurs et actrices de l’époque et il accentuait les mises en scènes choquantes et aussi l’érotisme. Le festival des Transphotographiques a présenté son œuvre non seulement dans l’exposition elle même mais aussi par un film documentaire qui a été crée avec l’étroite collaboration de la famille et des amis de ce photographe disparu.

L’exposition des photos de mode de Peter Knapp des années 1960 – 1980 a été une grande découverte pour de nombreux visiteurs. Ces images artistiquement très impressionnantes, des fois réalisés, sous une forme graphiquement réduite du style op-art, une autre fois avec des compositions simples aux couleurs accentuées soulignant d’une manière adéquate les modèles d’époque des sociétés Courréges et Dior et encore une autre fois, choquantes, par des mises en scènes en extérieure compliquées qui comme si elles prédisaient de nombreux éléments du postmodernisme, n’ont jusqu’à nos jours rien perdu de leur force. Au contraire, la vague d’intérêt nostalgique actuelle pour les années 60 et 70 souligne encore plus leur force.

Parmi les plus grandes surprises du festival se trouvait la collection des cliché de mode très colorés dans le style des tableaux des grands classiques de la peinture mondiale, qui a été récemment crée sur commande du New York Times par le photographe américain Joel Peter Witkin, connu jusqu’à présent surtout pour ses mises en scène apocalyptiques et pour ses natures mortes de modèles hommes ou femmes handicapés, de cadavres d’établissements médico-légaux ou d’animaux torturés. Ces paraphrases lissés des tableaux de Rembrandt, Picasso ou Hopper ne ressemblaient en rien à ce qu’il a déjà fait auparavant. Elles ne manquaient pas d’humour mais elles étaient loin d’être aussi originales, inventives, et visuellement attractives que les clichés de mode de Serge Lutens qui s’est laissé inspirer par les ouvres des classiques de la peinture moderne il y a déjà quelques décennies.

Dans des magnifiques locaux du Palais des Beaux Arts où se dirigeaient les foules de visiteurs pour voir l’exposition de Goya qui rassemblait aussi d’autres œuvres inspiré par son œuvre ( par exemple celles de Morimura ou celles des frères Chapman ), s’est déroulé la rétrospective du photographe français à moitié oubliée David Seidner, preparée par le directeur de la Maison Européenne de la Photographie à Paris Jean-Luc Monterosso. Outre des photographies de mode classiques, des fois inspirées par les maitres de la peinture, l’attention se portait sur les portraits originaux de dizaines des plus important artistes européens et américains. L’exposition «Héros» de Charles Fréger, dans le palais gothique Rihour, a été composée de portraits colorés des officiers et des dirigeants africains dans leurs uniformes. Les clichés dans le style d’Auguste Sander, capturant les hommes photographiés avec un regard pointé directement vers l’appareil photo, ne manquaient pas d’ironie et d’un certain caractère fantomatique surréaliste.

 

L’exposition thématique sur les motifs de la dentelle dans la photographie a été soigneusement préparé dans le milieu fascinant de l’ancien hospice moyenâgeux Comtesse et elle a présenté un large éventail des œuvres allant de William Henry Fox Talbot, à travers Man Raye et Germain Krull jusqu’à Annette Messager.

Par contre, la petite exposition du baron Adolphe de Meyer dans la Maison de la Photographie qui montrait plutôt des œuvres secondaires et qui ne montrait pas la place essentielle de l’auteur dans les débuts de la photo de mode dans les premières décennies du 20 siècle, a été très décevante.

 

 

Les expositions présentant les manipulations numériques des clichés photographiques ont été très diverses et ceci au niveau des thèmes mais aussi de la qualité. Dans l’exposition des lauréats du prix Arcimboldo des années 1999 – 2008 mon attention a été attiré plus par les légères interventions dans les perspectives de Patrick Fournial ou les paraphrases inventives des tableaux de Hopper par Christophe Clark et Virginie Pougnaud, que par les images impressionnantes mais aussi très kitsch des filles nues se déshabillant de leur propre peau de Nicole Tran Ba Vang. Les convultions et l’effort d’utilisation des effets superficiels ont dominé de nombreuses expositions d’images numériquement rétouchés. L’exception venant des comparaisons amusantes des chiens et de leur maîtres avec les cheveux si ressemblants aux poils de leur chéris à 4 pattes de Sabine Pigalle. Et surtout les photographies de notre Tereza Vlckova qui était la seule participante à avoir trois expositions individuelles et qui a réussi avec ses œuvres suggestives à attirer l’attention non seulement des professionnels mais aussi d’un large public.

Des trois expositions de Tereza Vlckova, une seule série, la série Little Garden intentionnellement douloureuse et sucrée, qui présentait des modèles d’un jeune créateur de mode Ondřej Adámek dans des clairières de forêt, dans des prairies de montagnes au milieu des champignons rouges, faisait nettement partie de la photo de mode. Dans des photographies de jeunes filles fragiles en lévitation rêveuse sur les sommets des collines de Beskydy de la série A Perfect Day, Elise…on trouve l’inspiration des œuvres symboliques du passage du 19ième au 20ième siècle. L’auteur, dans leurs regards fixés vers le haut et aussi dans leurs efforts pour rompre les lois de l’attraction universelle, symbolise le désir du détachement de la réalité terre à terre vers les sphères spirituelles supérieures et aussi la fusion avec la nature qui est dans ses œuvres un certain idéal de la beauté, de la pureté, de la blancheur immaculée et de la spiritualité. Dans les portraits magiques, mystérieux et des fois même effroyables des jumeaux dans de différents décors naturels de la série Two, nous ne sommes pas capables de faire la différence entre de véritables jumeaux et des clones de fillettes créés par ordinateur. Ce n’est cependant pas uniquement le jeu de l’auteur, car elle essaie d’explorer l’identité des deux personnes physiologiquement très proches et dont la ressemblance extérieure est accentuée encore par les mêmes vêtements et les mêmes coiffures. Dans les contrastes délicats et les analogies des expressions étonnamment adultes de leurs visages, elle souligne les questions sur la proximité de leur monde psychique, de leurs caractères, de leurs relations mutuelles, des questions sur leur alter ego et sur le nombre de visages qui se cachent dans chacun de nous. Tereza Vlckova qui est toujours étudiante de l’Institut de Photographie créative de l’université de Silésie à Opava, ainsi que de l’Atelier de la photographie publicitaire de l’université Tomas Bata à Zlín, est devenue, avec ses trois expositions chaleureusement accueillies, une vraie star du festival de Lille. Ses oeuvres seront pendant l’été exposés aux festivals photographiques à Arles et à Lyon, et aussi à la Photokina à Cologne.

Vladimír Birgus

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