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Transphotographiques / Lille / Hauts-de-France
 

Voix du Nord : Fontcuberta, maître de l’illusion, pose son regard critique et ironique sur la photo

Fontcuberta, maître de l’illusion, pose son regard critique et ironique sur la photo

Un maître ès illusions aux Transphotos ! Invité d’honneur du festival, Joan Fontcuberta jette en quatre thèmes (la faune, la flore, la géographie et l’espace) les bases d’une encyclopédie toute singulière.

Joan Fontcuberta, d’où vous vient cet oeil ironique sur le monde, sur la photographie qui en est l’une des formes de représentations ?

« Je crois d’abord que les crises sont nos moteurs, c’est ce qui nous pousse à renouveler nos pensées, nos attitudes. Je trouve aussi qu’il y a trop de solennité dans l’art contemporain. Il faut toujours rap-porter une petite touche d’ironie, cela donne un pouvoir de pénétration plus percutant. Et puis l’ironie, c’est très typique du sud, très méditerranéen, on aime rigoler, se moquer, rire avec les gens. »

Ce regard est-il le fruit de votre parcours personnel et artistique ?

« On est dans un monde où l’image virtuelle prend une place de plus en plus importante. Je viens de l’Es-pagne franquiste, sa censure, sa propagande. Il fallait une pédagogie de la critique et de la méfiance
envers les médias et la politique. Cela a soulevé en effet chez moi la volonté d’être sceptique. »

Vous insistez sur le poids qu’a l’image dans notre société. Pour en révéler les effets pervers ?

« Chaque image est, en effet, un piège. Il faut faire attention à la façon de lire les images car aujourd’hui, contrôler les images, c’est contrôler les esprits. Dans mes projets, j’essaye de provoquer les doutes, l’ambiguïté, l’équivoque. Tout en donnant des pistes au spectateur. »

Au risque de tromper les gens ?

« Je ne veux pas les tromper, seule-ment qu’ils découvrent avec leurs propres processus intellectuels où il y a tromperie. Mes images innocentes sont comme des vaccins. Quand on fait croire à la pandémie de la grippe, à la présence d’armes dans certains pays, les messages sont tellement répétés qu’on finit par y croire. J’essaye de créer un état de transgression du manège de la communication. »

Pour les paysages d’Orogénèse, vous utilisiez un logiciel militaire. Vous êtes féru de technologie ?

«Je n’ai aucun fétichisme technologique. Le logiciel que j’utilise pour mes paysages, tout le monde peut l’utiliser aujourd’hui, il est gratuit. Aujourd’hui, faire une image est un acte très facile. Ce qui est plus difficile, c’est d’avoir un concept, de générer des contenus dans l’image. D’en gérer le sens. »

Vous avez investi des champs divers : faune, flore, géographie…

« Mais aussi politique, communication, religion… Mon idée est de réaliser une encyclopédie regroupant tous les thèmes possibles. Ce qui m’intéresse est de déconstruire tout discours d’autorité comme la science, l’église, le pouvoir, l’académie. Là, je travaille sur une série dans laquelle je collecte des images Internet d’autoportraits réalisés dans des miroirs. C’est une critique de l’album de famille comme dépôt de la mémoire collective. Aujourd’hui, à l’heure du numérique, des blogs, des téléphones mobiles, la photo s’éloigne de la vérité et de la mémoire. Alors qu’elle était née pour soutenir la vérité et la mémoire. »

► Joan Fontcuberta, « Une seconde nature », palais des Beaux-Arts de Lille, jusqu’au 20 juin.

On est dans un monde où l’image virtuelle prend une place de plus en plus importante. Juan Fontcuberta

 

Olivier Tartart, Voix du Nord 28 mai 2010

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